ARCHITECTURE IMPOSSIBLE
- dessins à l'encre de Chine
Le regard croit ne plus distinguer les formes qui s’évanouissent dans leur rigidité. Les lignes coulent et la matière vascille. Des formes jaillissent puis se perdent dans un flou optique de perspectives impossibles. Juxtapostion de valeurs dans un langage formel absurde. Juste une attente, comme un temple suspendu dans l’irréalité des contraires qui s’affrontent. La suspension d’un temps irréalisable qui s’agite dans son immobilité morbide. Les angles crissent et s’arrachent à leur complétude, ils gémissent imperceptibelement dans une volonté féroce de domination, alors que les applats chutent dans un abîme sans vestiges. Plus loin, les croisements s’éparapillent dans une improbable tension et plâne sur leurs intersections, une étrange odeur d’étendue sans fin. L’opposition tangible des couleurs contraires se résout dans l’élaboration complémentaire d’une langue inintelligible.
Perfidement, l’illusion persiste et s’acharne à tromper l’oeil désemparé qui jongle maladivement avec les grincements stridents des arrêtes anguleuses. Il est déjà trop tard et le temps s’enfuit dans un fou rire grotesque, laissant sur son passage une multitude de souvenirs immémorables. La destruction insolente des espaces visuels évoque l’artifice des sens et des représentations codifiées. Dans une torpeur maladroite et relative, la signification s’éloigne dangereusement du sens et sans détour, se complait dans le trouble qu’elle suscite. La perception corporelle est mise à l’écart, seul règne le vu, le regardé, l’observé, malgré cet amas glacial de tintements silencieux. Les tranches respirent dans l’ombre de leur affligeante rigueur incertaine. La sourde violence qui taraude les esprits catégoriques se reflète dans l’impossible agencement de cette rationalité placide et insipide.